Dans le cadre de la lutte contre le trafic de médicaments falsifiés, les autorités de santé publique ont pris plusieurs mesures pour tenter de limiter ce phénomène. En France, le phénomène reste marginal et les particuliers sont détournés de ce trafic, grâce notamment à la politique généreuse de remboursement des médicaments.
Cela étant, nous assistons ces derniers temps, du fait des contraintes budgétaires qui pèsent sur l’Etat, à une rationalisation des politiques de santé, notamment par l’exclusion de certains médicaments des listes des produits remboursables par la Sécurité sociale.
Ce rabotage va-t-il encourager certaines personnes à recourir à d’autres voies pour se procurer leurs médicaments, notamment sur internet ? Le législateur n’ignore pas ces problématiques.
Ainsi, l’article 38 de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament vient autoriser le Gouvernement à prendre une ordonnance pour encadrer l'information et le commerce électronique de certains produits de santé.
A cet effet, l’ordonnance prise le 21 décembre 2012 pour encadrer la vente de médicaments sur Internet transpose la directive du 8 juin 2011 relative à la lutte contre la falsification de médicaments.
L’autorisation timide de la vente sur Internet de produits de santé
Les politiques de santé publique sont par nature un domaine très sensible du fait qu’elles intéressent la santé et le bien-être des personnes. Le législateur intervient donc avec d’extrêmes précautions. Par conséquent, personne ne sera surpris de constater que l’ordonnance du 21 décembre 2012 n’autorise la vente de produits de santé sur Internet que pour les produits délivrés sans prescription médicale.
Dès lors, l'article L5125-34 du Code de la santé publique prévoit :
Seuls peuvent faire l'objet de l'activité de commerce électronique les médicaments qui ne sont pas soumis à prescription obligatoire.
La vente en ligne ne s’applique donc en théorie que pour des produits à base de plantes et à usage thérapeutique (pharmacopée) et être interdite pour la commercialisation de médicaments relevant de la pharmacologie.
Ainsi des sites Internet commercialisent déjà une multitude de produits que l’on peut obtenir sans prescription médicale. A titre d’exemple, le site « 1001pharmacies.com », est spécialisé dans la vente de produits de santé en partenariat avec des pharmacies.
Mais les sites de vente en ligne doivent veiller au respect des conditions posées par l’ordonnance car leur responsabilité peut être engagée. D’ailleurs, le texte précise clairement que le pharmacien répond de tous les dommages dont son activité en ligne est à l’origine. Par conséquent, on se demande comment sera articulée la responsabilité entre le site (par exemple 1001pharamacies.com) et les pharmaciens qui ont adhéré. Une disposition particulière est réservée à ce cas de figure à l’article L5125-37 du Code de la santé publique.
Cet article prévoit qu’à l’instar des officines de pharmacie physiques, les officines peuvent également mettre un site internet en commun. Il s’agira d’un regroupement qui aura seul la licence et donc l’autorisation de créer et d’exploiter un site internet. D’ailleurs, il est prévu par ce texte que le site internet du regroupement ne pourra fonctionner que lorsque les officines adhérentes auront préalablement fermés leurs sites internet respectifs. Ainsi, la responsabilité dans le fonctionnement du site incombera a priori exclusivement au groupement.
Les conditions pour vendre en ligne des produits de santé
La condition essentielle pour commercialiser en ligne prévue par l’ordonnance est celle relative à la détention d’une licence pour créer une officine de pharmacie physique. Seuls les pharmaciens titulaires d’une licence pour ouvrir une pharmacie de proximité sont donc autorisés à compléter l’activité de leur officine par celle de vente en ligne.
D’autres obligations pèsent sur le pharmacien, notamment celles d’informer le conseil de l’ordre des pharmaciens de l’ouverture de son site de vente en ligne et de soumettre la création de son site internet d’une officine à une autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé.
Toutefois, une décision du ministre chargé de la santé peut exceptionnellement accorder cette autorisation.
Il faut signaler également que conformément aux libertés d’établissement et de prestation de service prévues aux articles 49 et 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne, tout pharmacien habilité à vendre des médicaments au public dans un Etat de l’Union peut commercialiser sur son site internet, même en direction de la France, ses produits de santé, à condition de respecter les exigences de vente posées par l’ordonnance du 12 décembre 2012 (articles L5125-34 et L5125-40 du Code de la santé publique).
Responsabilités et sanctions dans le cadre de la vente en ligne de médicaments
L'article L5125-34 insiste sur l’obligation d’exploiter l’activité en ligne en conformité avec les bonnes pratiques prévues par le code de déontologie. Le titulaire de l’officine est seul responsable du contenu du site et des conditions dans lesquelles l’activité en ligne est exercée.
En cas de manquement à l’une des dispositions prévues par l’ordonnance le directeur général de l’agence régionale de santé territorialement compétente dispose du pouvoir de prononcer la fermeture du site internet pendant une durée maximale de 5 mois. Sanction qui est renouvelée en cas de non mise en conformité.
Le directeur peut également prononcer une amende administrative pouvant atteindre 30 % du chiffre d’affaires réalisé par le site Internet.